A
l’heure où l’on parle de préservation de la planète, de développement
durable, de recyclage, pourquoi les plongeurs n’adopteraient-ils pas
cette politique pour eux- mêmes ?
Après
tout, la préservation (de la santé) du plongeur ne devrait-elle pas de
la même façon passer systématiquement par un recyclage ? Le
développement durable de notre activité n’est-il pas soumis au même
souci de « conservation » de ses pratiquants ?
A
partir du niveau 2, après avoir sacrifié au rite initiatique de la
formation technique, un nouvel accès privilégié s’ouvre sur le monde
sous-marin avec l’AUTONOMIE. Grâce à cet apprentissage parfois
douloureux, il devient tout à coup possible d’évoluer avec une relative
liberté dans un espace qui peut être aussi fantastique que périlleux.
Là, encore à l’abri de la convoitise du commun des terriens, se cachent
les précieux trésors d’une nature sauvegardée par le plus terrible des
gardiens, l’ EAU!
C’est en composant avec cet élément, et non en s’y opposant, que le plongeur doit assumer son autonomie. La capacité d’intégration
et l’humilité sont les principales conditions pour cela… deux qualités
morales qui ne peuvent que s’enrichir de l’expérience et de la
pratique. Mais s’il paraît nécessaire que l’apprentissage soit suivi
d’une pratique régulière, il paraît tout aussi important de préserver
les capacités physiques et techniques, compléments indispensables pour
préserver ou parfaire l’aptitude d’adaptation du plongeur.
Malgré
cela, tout à notre plaisir d’évoluer (presque) librement et sans jamais
rencontrer de problèmes dans les 3 dimensions que nous offre l’univers
subaquatique, nous perdons parfois conscience des risques que
représente le milieu. Routine, excès de confiance, banalisation du
danger, sont autant de facteurs qui participent largement à ce lent
mais inexorable glissement vers l’inconscience.
Paradoxalement
et de façon tout à fait contradictoire avec la théorie du
« renforcement par la pratique », on peut considérer que plus nous
plongeons, plus nous sommes susceptibles d’être exposés à cette
véritable dégénérescence comportementale.
Seul
l’entraînement technique permet d’éviter cette spirale du laxisme et ce
n’est (en principe) que grâce à leur rôle de formateurs, autant qu’à
leur « obligation de sécurité », que les moniteurs échappent à ce
phénomène. Mais les exemples ne manquent pas pour prouver que là encore
ce n’est pas une règle absolue.
Face
à la réalité de cette situation, hormis une formation de qualité, la
sécurité du plongeur en autonomie ne peut donc que passer par
l’entretien :
1/ d’une bonne condition physique (par l’exercice),
2/ de la capacité d’intégration (par une pratique régulière),
3/ des automatismes techniques (par l’entraînement périodique).
En
l’absence de l’une de ces conditions, on s’expose inévitablement un
jour à devoir gérer une situation qui tendra forcément à dégénérer
parce qu’elle sera mal contrôlée.
Si
la plupart des plongeurs sont conscients du caractère indispensable des
deux premières, il est beaucoup plus rare d’en voir redemander une dose
de technique « pour le plaisir »… Qui sacrifierait son temps ou son
argent pour une activité qui ne peut servir qu’aux autres, car c’est
bien connu « les problèmes n’arrivent qu’aux autres » ?
Il
faut reconnaître que le vieux souvenir des durs moments passés en
formation n’est pas là pour aider à franchir le pas. Alors pourquoi ne
pas voir cette démarche sous un angle plus sympathique ?
Destiné
à ré-ancrer, voire à mettre jour les automatismes d’intervention et les
méthodes de plongée profonde, le recyclage technique peut avoir un
aspect moins rébarbatif si on l’organise par modules de deux à trois
séances et par binômes. Chaque binôme est formé par affinité et suivi
par un moniteur pour la durée du recyclage. Après un rappel théorique
des principes et objectifs de la gestion d’incidents en plongée
profonde, ces séances sont conduites comme un film en décor naturel
dont les deux plongeurs (binôme) sont les acteurs et le moniteur joue
le rôle du réalisateur. Plus le scénario est réaliste, plus cette
expérience mêlant vieux savoir-faire et nouveaux apprentissages est
susceptible d’être enregistrée efficacement dans le cerveau du
plongeur, renforçant de même coup sa capacité à répondre
« intelligemment » à une éventuelle situation d’urgence.
La
coresponsabilité n’est pas qu’un mot employé par les assureurs ou les
juges, c’est avant tout un contrat moral que l’on a avec son binôme et
le recyclage technique reste malgré tout le meilleur moyen de l'assumer
autant que de plonger le plus longtemps possible et avec un maximum de
plaisir, même si rien ni personne ne l’impose...
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