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Le Passage dans l’autre monde...
Auteur : Patrick Orti
Publication : Mars 2008
Rappelons-nous humblement que nous ne sommes malheureusement pas faits pour vivre sous l’eau. Ce n’est donc seulement qu’au prix d’une adaptation plus ou moins laborieuse (selon les individus) et en misant avant tout sur la sécurité, que nous pouvons jouir de notre passion pendant longtemps.
Mon expérience sous-marine et des années de « scuba-pédagogie », me confortent aujourd'hui dans l’idée que la technique est un détail qu’il est inutile d’aborder tant que nous ne sommes pas passés du stade de terriens à celui de pseudo- amphibiens (homo-aquaticus ?).
 
Sans adaptation au milieu, c'est non sans difficultés (voire douleur) que le novice surmontera ses "blocages", principales source de crainte, de confusion et parfois de panique. Pire, lorsque dans ces conditions ce plongeur finira par franchir « à l’arrachée » ces pénibles étapes qu’auront été ses différents brevets, ses savoir-faire techniques ne compenseront pas le handicap qu’il aura tant qu’il se sentira étranger au monde dans lequel il évolue.
 
Le « passage dans l’autre monde » s’accompagne de trop de bouleversements pour qu’on le considère comme anodin…
 
Aussi longtemps qu’un minimum d’osmose avec le milieu n’est pas atteint, le signal de la réflexion reste brouillé par des interférences émotionnelles. C’est ainsi que parfois, avec l’inertie d’un cerveau encombré par des pensées parasites, le surdoué se retrouve dernier de la classe, avec l’étrange impression de n’avoir qu’un seul neurone.
 
Préalablement aux apprentissages techniques, il me paraît donc plus que nécessaire de préparer le mental du nouveau plongeur et d’opérer une véritable (ré)éducation de ses sens, afin qu’il commence par rechercher une réelle décontraction pour enfin parvenir à intègrer et à interprèter toutes les informations que lui transmet le milieu subaquatique.
 
Au fil de ses apprentissages et de son expérience, le plongeur doit ainsi arriver à s'intégrer au mieux dans son nouvel environnement en développant
une aptitude naturelle à traduire et à gérer spontanément ce qu’il ressent, ce qu’il entend et ce qu’il voit.
C’est seulement lorsque l’enfant a appris à marcher sans penser à la position de ses pieds que le monde s’ouvre à lui. Selon moi, il en va de même pour le plongeur, pour qui la plus simple exploration peut devenir un parcours du combattant s’il doit lutter contre le courant, et je ne parle pas de l’assistance à son binôme qui peut se révéler extrêmement complexe s’il n’a conscience de monter que lorsqu’il se retrouve dans un nuage de bulles.
 
Le magnifique exemple des non-voyants nous démontre que plutôt que d’apporter des contraintes, le milieu peut devenir une précieuse source d’indicateurs qui nous aident à garder le contrôle quelles que soient les circonstances.
Ainsi, après le passage par l'indispensable phase de relâchement, nos capteurs nous permettent de mieux "écouter" les effets de la pression afin de gérer plus efficacement notre évolution dans les 3 dimensions, ou de ressentir le mouvement de l’eau pour adopter la position optimale dans le courant ou la houle. Enfin les sons nous apportent de précieuses informations sur l’environnement ou sur notre binôme et il ne nous reste plus qu'à conserver une attention suffisante à la faune et à la flore qui nous entourent pour compléter le bonheur de notre passage dans le monde sous-marin.
 
Bien entendu, le bien être ou le confort découlant de cette fusion avec le milieu, ne doit pas nous faire oublier que la vigilance reste notre principale assurance contre le danger et ce n’est qu’à cette condition que nous pourrons trouver « la combinaison d’or » : Plaisir + Sécurité …
Pour conclure, il me semble regrettable que le cursus « standard » d’apprentissage du plongeur ne passe pas par un minimum de préparation mentale et une vraie maîtrise de l’apnée – discipline qui passe obligatoirement par une parfaite intégration au milieu.
En effet, pour peu qu’il ait le sens de l’autodiscipline, un bon apnéiste fait toujours un bon plongeur, l’inverse est rarement vrai… Et je ne parle pas de la formation des moniteurs qui devrait être à la base de la solution….
 
Aïe ! J’entends déjà gronder la polémique…
 
Dans notre société où tout doit aller très vite, notamment pour des raisons économiques, il y a fort à parier que beaucoup seraient contre une formation plus longue, donc plus coûteuse… Encore faudrait-il ne pas perdre de vue la valeur ajoutée par ce type de formation (100% de plongeurs heureux !).
 
… Enfin, en terme de marketing, pourquoi ne pas imaginer un concept à deux vitesses ; formation courte, pour la «plongée occasionnelle» - formation longue, pour la «plongée passion».
Malheureusement la complexité d'un tel débat le rend quasiment impossible et nous devrons nous contenter de rêver à un système idéal, ou ... d'assumer individuellement nos choix pédagogiques.
 
Pour ma part c'est ce que je fais, car j'estime que s'il est bon d'aller à l’essentiel, il reste indispensable de ne pas oublier nos principaux et indissociables objectifs...
 
Plaisir et Sécurité